La récolte du bois s’accompagne d’une exportation d’éléments nutritifs. Un prélèvement irraisonné de la biomasse ligneuse peut dès lors engendrer des déséquilibres nutritionnels graves au sein des forêts, compromettant la durabilité de ces écosystèmes. Dans ce contexte, un outil permettant d’estimer ces exportations minérales a été développé.
Dans la lutte contre le changement climatique, l’utilisation accrue du bois comme source d’énergie renouvelable fait partie des solutions envisagées pour atteindre les objectifs de réduction des émissions nettes de gaz à effet de serre. Dans cette perspective, les rémanents, correspondants aux fines branches et aux petits arbres jusqu’ici laissés en forêt, sont susceptibles d’être récoltés avec les troncs et les grosses branches lors des exploitations forestières. Ceci n’est toutefois pas sans risques pour la vitalité des forêts. En effet, une récolte plus intensive du bois accentue l’exportation hors de l’écosystème des éléments minéraux contenus dans les arbres exploités et peut être à l’origine d’un appauvrissement du sol, engendrant une perte de croissance, voire même une augmentation de la mortalité des arbres. Une gestion durable de la forêt passe donc par la quantification des exportations minérales accompagnant les exploitations afin de définir des intensités de prélèvement compatibles avec le maintien à long terme de la fertilité des sols.
Les objectifs de cette recherche sont, premièrement, de déterminer les minéralomasses, c’est-à-dire les quantités d’éléments minéraux contenues dans les arbres, et leur répartition entre les différents organes et, deuxièmement, d’en déduire les exportations en fonction de l’intensité de récolte. L’étude se focalise sur les forêts de chêne et de hêtre, espèces feuillues prépondérantes en Wallonie.
Les résultats révèlent une forte décroissance des concentrations d’éléments minéraux avec le diamètre des organes. Dès lors, à biomasses récoltées égales, les pertes minérales pour l’écosystème sont beaucoup plus fortes pour les branches que pour les troncs. Par ailleurs, pour certains éléments tel le magnésium, présentant souvent des niveaux critiques de disponibilité dans les sols (1), la quantité exportée lors de l’exploitation des bois peut être supérieure aux apports par les retombées atmosphériques. Or, celles-ci constituent généralement les principales entrées minérales dans l’écosystème. Ces résultats soulignent l’importance de définir les intensités de prélèvement de la biomasse de manière raisonnée. Ils seront intégrés à la cartographie des risques de carence (1) afin de fournir au gestionnaire un outil d’aide à la décision lui permettant de répondre à la question « Quelle intensité maximale de récolte autoriser en fonction du type de sol sans compromettre la vitalité de ma forêt ? ». ◆
Chercheurs : Frédéric André, Holger Wernsdörfer, Paul Igor Hounzandji (UCLouvain)
Encadrement scientifique : Quentin Ponette et Mathieu Jonard (UCLouvain), en collaboration avec Laurent Saint-André (INRA). Les données de l’Inventaire Permanent des Ressources Forestières de Wallonie ont été préparées par Hugues Lecomte (DNF).